-
~ 376 ~
Deux jours plus tard.
Quand après trois petites heures de vol ils arrivèrent en Angleterre et plus particulièrement dans ce fameux quartier d’Harlesden, la main confortablement entrelacée de Mila dans celle de son mari devint soudainement moite.
Ce dernier n’en menait pas large non plus. Il allait devoir faire face à ce passé honteux qui leur avait beaucoup couté et bien que ce n’était pas agréable, il était prêt à prendre ses responsabilités pour le bien de sa famille.
Ils avancèrent alors lentement vers leur destination en traversant le petit parc ou deux petits enfants étaient en train de jouer paisiblement. Plus ils approchaient de l’appartement d’Evangelia, plus ils sentaient l’odeur du shit monter.
A l’odeur de la substance, ils devinèrent aisément que c’était de la très mauvaise marchandise.
Comment savaient-ils ça ? Et bien tout simplement parce que plus jeunes, ils s’étaient déjà roulés plusieurs fois quelques joints et le cannabis qu’ils se procuraient était bien plus pur et agréable à sentir que l’immondice qui traversait leurs pauvres narines...
- Bon... on y est. Dit Mila, fébrile une fois face à la porte de l’appartement d’Evangelia.
Brian renforça son étreinte autours de la main de sa femme, souffla un bon coup et sonna.
Ils attendirent patiemment que la porte s’ouvre pendant trente secondes... qui se transformèrent en une minute où ils n’entendirent aucun mouvement ni aucun son émanant de l’appartement. Ils ne pouvaient pas voir ce qu’il s’y passait étant donné que les stores étaient fermés...
Ils en conclurent donc qu’elle n’était pas à son domicile. Peut-être travaillait-elle le dimanche après tout... Ils s’y étaient un peu attendus.
- On peut peut-être attendre un peu dans le parc, peut-être qu’elle arrivera plus tard... ?
Brian n’eut pas le temps de répondre qu’ils entendirent enfin la porte de l’appartement s’ouvrir. Alors qu’ils étaient dos à la porte du logement, ils se figèrent quelques secondes, croyant que c’était Evangelia qui leur ferait face... Cependant, lorsqu’ils se retournèrent enfin, ils firent face à un jeune homme avec des dreadlocks sur la tête.
- Yo... Les salua-t-il en se frottant les yeux. Il venait visiblement de sortir d’une sieste.
- Heu... Bonjour, est-ce qu’Evangelia Crùz est là s’il vous plaît ? Demanda Brian.
- Ça fait un p’tit bail qu’elle s’est barré de ce quartier pourri, man. Répondit le jeune homme lentement. - J’ai eu le seum quand elle m’a annoncé ça ! C’était ma meilleure cliente mais bon... Elle m’a filé son appart, alors j’vais pas m’plaindre. Ajouta-t-il en haussant nonchalamment les épaules avant de les regarder de haut en bas.
Le cœur de Mila et Brian sauta un battement à l’annonce du départ d’Evangelia. Bizarrement, ils n’avaient pas prévu cette éventualité et ils ne pouvaient se résoudre à avoir fait tant de chemin pour au final avoir échoué leur mission.
- Est-ce que vous savez où elle a déménagé ? Lui demanda alors Mila, pleine d’espoir.
- Elle a rien voulu m’dire, c’te connasse... Répondit son interlocuteur. - J’espère qu’elle regrettera de m’avoir lâché comme ça quand elle se rendra compte que personne cuisine d’aussi bon space cakes que moi. Mais vous êtes qui, vous ? Vous venez clairement pas d’ici, vous êtes bien trop sapés pour ça. Z’êtes pas keufs j’espère... ?! Dit-il soudainement paniqué d’avoir potentiellement révélé son trafic d’herbe.
- Non, non ! Je suis sa sœur. Révéla la grande brune, espérant que cela aiderait son interlocuteur à répondre davantage à ses questions.
- J’me disais bien qu’il y avait un air de ressemblance. Elle m’avait jamais dit qu’elle avait une sistah. Bon, en même temps elle parlait jamais de sa vie, alors...
- Vous avez son numéro ? Vous pouvez la contacter pour savoir où elle se trouve ? On la cherche depuis longtemps... Lui demanda-t-elle.
- Bah attends que j’choppe mon phone... Dit le jeune homme en portant sa main dans sa poche arrière.
Toujours avec cette nouvelle lueur d’espoir dans les yeux, Brian et Mila le regardèrent composer un numéro et porter l’appareil à ses oreilles. Tous les trois entendaient les tonalités retentir jusqu’à ce qu’il tombe sur une boîte vocale.
- J’lui laisse un message ? Leur demanda-t-il pendant que la voix off de la messagerie vocale lui donnait les instructions pour laisser un message à son destinataire.
- Oui s’il vous plaît. Dites-lui que Mila et Brian sont passés la voir et dites-lui d’appeler ce numéro. Lui demanda Mila en lui montrant son propre portable qui affichait son numéro.
- Hé meuf, ça fait des mois qu’tu t’es barré et même pas tu m’appelle pour savoir comment j’vais ?! J’pensais qu’on était pote. Vas-y, laisse tomber... Tu me déçois trop !! Y a ta sœur et un certain Brian qui sont passé à ton ancien appart’. Ils te cherchent pour j’sais pas quoi... Appelle-les au 809 666 5700. Voilà. Et j’suis pas ta secrétaire, boloss. Dit-il en raccrochant. - Voilà.
- Merci beaucoup, jeune homme... Vous vous appelez comment d’ailleurs ? Lui demanda Brian.
- J’m’appelle Kenny. Me faites pas la blague de South Park, on m’a assez pété les burnes avec ça...
Brian et Mila se regardèrent en se retentant de ricaner malgré leur déception.
- Merci encore Kenny. On va pas vous embêter plus longtemps... Le remercia Mila gentiment.
- De rien m’dame. Eh dites, vous voulez du gâteau ? Je vous en offre une part chacun gratuit ! Vous puez l’argent à plein nez mais j’ai besoin d’me faire une nouvelle clientèle alors parlez d’moi si ça vous a plu !! Leur proposa-t-il tout à coup très énergique.
- Sans vous offenser, si vous faites vos space cakes avec le cannabis qu’on a senti en venant ici, je pense pas que vous bossiez avec un bon produit. Lui fit remarquer Brian.
- Un connaisseur à ce que j’vois ! Ce que tu as senti, c’est le shit du mec en dessous. C’est mon concurrent mais pas une fois il a réussi à m’égaler. J’suis jamaïcain, man. Moi je bosse avec des produits d’mon pays sans saloperies ajoutées.
Brian et Mila se regardèrent une seconde fois, un léger sourire au visage. Bien qu’ils étaient déçus de ne pas avoir réussi à voir Evangelia, ils restaient confiants sur leur retrouvaille grâce à l’aide de ce Kenny. Pour le remercier encore une fois et surtout par pure nostalgie de leurs plus jeunes années, pourquoi ne pas s’offrir une petite friandise ?
- Vas-y, aboule... Accepta le père de famille en chuchotant.
Sa femme se contenta de ricaner avant que Kenny ne revienne avec deux petits sachets contenant ce qui avait l’air d’être le brownie au chocolat le plus banal du monde. Ils croquèrent chacun dans la pâtisserie et rencontrèrent un mélange de saveur qui leur fit tourner les yeux.
C’était vraiment très bon !
- Vous en avez encore... ? Demanda alors Brian.
Ils allaient en ramener un peu avec eux en Finlande, tout compte fait...