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    Après un long vol de plus de onze heures sans escales, le couple arriva enfin à bon port. Bien que le paysage allemand détonnait beaucoup avec la République Dominicaine, le ciel était dégagé et le climat très doux en cet après-midi ensoleillé.

    Se retrouver face à la maison familiale Pawelski refit monter des souvenirs de leur dernière escapade ici et ils se mirent à sourire bêtement. Il y a encore quelques jours, jamais ils n’auraient pensés se retrouver là à nouveau tous les deux. Cela les fit sourire davantage...

     

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    Toujours main dans la main, ils avancèrent tranquillement vers la bâtisse, prêts à passer ces quelques jours où la courte vie d’Ozvan serait mise à l’honneur.

    La maison n’avait pas changé depuis leur dernière visite. Tout était propre et bien rangé, grâce à la femme de ménage que Köy payait très gracieusement pour entretenir la maison pendant son absence.

    Immédiatement, le jeune homme sentit la « présence » de sa mère au fur et à mesure que Caly et lui avançaient dans le couloir. Il était déjà très heureux et épanoui, mais son retour dans sa maison natale lui donna un fort sentiment d’apaisement. Sentiment qu’il n’avait plus ressenti depuis un long moment...

     

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    Après s’être rafraîchi et changés, ils allèrent faire quelques courses histoire de remplir leur frigo pendant leur séjour mais également pour préparer la soirée en l’honneur d’Ozvan. Leur petite escapade ne passa pas inaperçue car les locaux les reconnurent immédiatement. Ils restèrent cependant très respectueux et courtois et se contentèrent de les saluer très chaleureusement. 

    Après tout, les Pawelski étaient bien connus et très respectés dans la ville. Et cela bien avant que le dernier de la lignée ne devienne une star mondialement connue. C’était sûrement l’unique ville allemande où Köy pouvait se balader sans provoquer un raz-de-marée de fans. 

    Cependant, Caly et lui savaient que dorénavant, la nouvelle sur la reprise de leur relation ne tarderait pas à faire la une des réseaux sociaux et bientôt de la presse. Ils étaient à l’aise avec ça... Et puis de toute façon, les rumeurs circulaient déjà depuis leur séjour à Paris où plusieurs clichés de leurs escapades tournaient déjà un peu partout sur le web.

    Ils en avaient déjà longuement discutés pendant leur vol et avaient décidés de ne réagir à aucuns articles ou posts Facebook/Instagram ou tweet et d’officialiser cette nouvelle selon leur terme : c'est-à-dire sur scène en interprétant la chanson qu’ils avaient composés ensemble sur la plage jacmélienne en compagnie de Dante.

    Cet événement aurait lieu lors de la dernière date de la tournée de Gen X au Hartwall Arena d’Helsinki. Date qui avait la particularité d’être le jour de leur anniversaire, en plus.

     

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    Avant de rentrer, ils passèrent rendre visite à Ozvan dans sa dernière demeure. Le cimetière était désert en ce début de crépuscule et une brise agréablement fraîche caressait leur peau et faisait virevolter leurs cheveux.

     

    - Hallo, mama... [Salut, m’man] Dit Köylen dans la langue de Goethe, tout en posant un jolie bouquet de fleur devant sa pierre tombale. - Ich vermisse dich so sehr... [Tu me manques tellement...]

     

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    Calypso resta muette et se contenta d’écouter Köylen parler à sa mère avec beaucoup d’émotion. Elle aurait tellement voulu la connaître et elle espérait du plus profond d’elle-même qu’elle réussirait à lui rendre hommage avec l’album posthume à venir.

    C’était le projet ultime de Köylen, la raison principale pour laquelle il était devenu chanteur et elle comptait bien mettre toute son énergie pour l’aider à concrétiser ce projet. Ils n’en avaient pas encore rediscuté depuis, mais elle savait bien que le sujet serait mis sur la table dans les prochains jours.

    Autant dire qu’elle avait vraiment hâte de découvrir le programme !

     

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    Elle sorti de ses songes quand elle sentit Köylen la prendre dans ses bras et déposer un baiser sur sa joue. Ils restèrent comme ça pendant plusieurs minutes, dans un silence apaisant et presque solennel. Elle se sentait aimée et protégée dans cette étreinte. Elle caressa alors affectueusement le dos du jeune homme pour lui faire ressentir la même chose. 

    Caly adorait sentir le souffle de Köylen contre son cou, mais qu’elle ne fut pas sa surprise lorsqu’elle l’entendit renifler et sentit quelque chose de chaud et d’humide couler sur sa peau : il pleurait silencieusement et à chaude larme.

    Sans même se poser de questions, elle resserra son étreinte autours de son petit ami et le laissa s’abandonner à ses pleurs qui devinrent de plus en plus prononcés pendant une bonne dizaine de minutes. 

     

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    Quand il se calma, il décolla lentement son visage rougit et un peu bouffi de l’épaule de Caly et colla son front au sien, les yeux clos. Cette dernière se contenta de sécher ses larmes avec ses doigts fins et délicats.

     

    - Tu veux rentrer à la maison ? Lui demanda-t-elle alors délicatement.

     

    Le grand brun se contenta de hocher la tête lentement. Il prit la main qu’elle lui tendait et ensemble, se dirigèrent vers la voiture, toujours dans le silence. Ce mutisme n’avait rien de malaisant dans la mesure où Caly comprenait tout à fait que Köy soit dans cet état après la visite de la tombe de sa mère. La raison même de leur présence ici était suffisante pour déclencher une telle réaction chez le jeune homme.

     

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    - Et dire qu’il était tout souriant et heureux il y a quelques heures... Se dit tristement Caly en jetant un coup d'oeil vers lui.

     

    Elle remarqua qu’il avait le coude nonchalamment posée sur la portière du véhicule et semblait être en pleine réflexion pendant toute la durée du court trajet jusqu’à leur destination. Elle se délectait cependant de sa main qui était affectueusement posée sur sa cuisse et ne manqua pas de poser sa main à elle au-dessus de la sienne quand elle n’en avait pas besoin pour passer les vitesses.

     

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    Quand ils arrivèrent chez Köylen ils rangèrent les courses et ce dernier commença à préparer le repas du soir.

    Caly, qui entra dans la pièce après s’être changée vint se coller à lui et déposa un baiser sur son épaule pendant qu’il était en train de mettre le couvercle sur sa chaudière. Elle salivait rien qu’à l’odeur du plat...

     

    - On pourra discuter tout à l’heure... ? Lui demanda-t-il alors sérieusement avec une once d’appréhension en la prenant une fois encore dans ses bras.

    - Bien sûr, Köy...

     

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    Ils ne se prirent même pas la tête et s’installèrent à même la moquette pour manger devant un épisode de BoJack Horseman où Köy retrouva son sourire et se détendit davantage. Ce dernier adorait cette série animée loufoque et satirique !

     

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    Une fois la panse remplie, Caly mit leur vaisselle dans le lave-vaisselle et retourna s’installer aux côtés de Köy qui avait coupé Netflix entre temps. Elle posa deux tasses de café sur la table basse et remarqua qu’il fixait intensément un coin précis de la pièce... Presque instinctivement, elle entrelaça ses doigts avec les siens.

     

    - C’était à cet endroit que se trouvait le piano de ma mère. Lui dit-il alors, un léger sourire au visage. - Je passais des heures et des heures à jouer dessus et à l’écouter faire la même chose... Continua-t-il avant de laisser s’échapper un long soupir de sa bouche.

     

    Caly ne répondit rien, préférant se contenter de resserrer son étreinte.

     

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    - Je suis désolé d’avoir craqué tout à l’heure.

    - Ne t’excuse pas pour ça, Köy. Répondit-elle presque de manière autoritaire. - Je sais que c’est difficile pour toi et qu’elle te manque atrocement. Tu avais toutes les raisons de craquer.

    - Ce n’est pas uniquement la mort de ma mère qui m’a fait craquer... J’ai repensé à toutes les conneries que j’ai fait,  à comment j’ai fait souffrir Kristina et à comment j’ai failli te perdre définitivement, aussi... Lui avoua-t-il encore. - J’ai chialé parce que ma mère aurait eu honte de moi si elle était encore en vie et aussi parce que malgré mes agissements, je ne t’ai pas perdu. T’es quand même là avec moi et tu m’aimes toujours...

     

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    - Bébé... C’est bon, c’est du passé. Le réconforta Caly.

    - J’ai raté tellement d’événements cruciaux dans ta vie... L’obtention de ton diplôme, le mariage de ton frère, la naissance de ton neveu... Ta rencontre avec ta mère biologique. Tu vois, ce sont toutes ces choses qui me sont revenu d’un coup comme ça, quand j’étais avec maman tout à l’heure et quand je t’ai pris dans mes bras, j’ai pété les plombs.

    - On vivra d’autres moments cruciaux et tout aussi beaux... Lui dit-elle alors, alors que c’était à son tour de sentir des larmes se former au coin de ses propres yeux.

     

    Il était vrai qu’à chacun des événements cités (à part sa rencontre avec Evangelia), elle avait eu une pensée pour lui malgré la haine qu’elle ressentait pour sa personne. Au plus profond d’elle-même, elle aurait aimé qu’il soit présent... Mais cela n’avait plus d’importance pour elle à présent.

     

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    - J’y compte bien... c’est d’ailleurs pour ça que j’ai réfléchi et que... Köy ne termina pas immédiatement sa phrase. Il semblait à la fois déterminé et inquiet, ce qui fit paniquer sa petite amie.

    - Et que quoi... ? Lui demanda-t-elle alors avec empressement.

    - Je vais faire le test pour savoir si j’ai le syndrome de Brugada.

     

    Caly ne dit rien mais l’expression de son visage se suffisait à lui-même. Elle était à la fois soulagée et préoccupée qu’il se soit enfin décidé à franchir le pas.

     

    - Je te rassure, je n’ai jamais senti de symptômes particulier, mais ça n’empêche pas que je flippe quand même, maintenant... Il m’était plus facile de vivre dans le déni mais je peux plus continuer comme ça, maintenant. Dit Köylen en ricanant nerveusement.

    - T’as oublié tous les cachets que tu avalais pour tes maux de tête ? Lui rappela-t-elle, la mine inquiète.

    - Tu as bien vu qu’aussitôt que l’Eurovision et la promo de l’album sont passés j’allais mieux. J’ai pas pris un seul Tylenol depuis. Répondit-il alors.

    - De ce que tu m’as dit, ta mère n’avait pas de symptômes particuliers non plus, Köy... Alors qu’est-ce qu’on fait s’il s’avère que tu es bien atteint ? Lui demanda-t-elle alors toujours aussi soucieuse.

     

    Köylen ne répondit pas tout de suite. Il semblait chercher ses mots pour lui répondre. Il soupira longuement une énième fois et lui répondit tout simplement :

     

    - J’en sais trop rien... J’en discuterai avec le médecin... J’ai conservé le numéro de celui qui a diagnostiqué ma mère post-mortem et je compte le contacter demain. J’ai vérifié et il est toujours en exercice, c’est juste qu’il a son propre cabinet, maintenant.

    -  Je t’y accompagnerai.

    - Je sais bien... et ça me rassurera de t’avoir à mes côtés.

     

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    Il semblait si fragile à ce moment-là que Caly ne put s’empêcher de venir l’enlacer et le serrer fort contre elle. Machinalement, elle se mit à lui masser la nuque, sachant que ça l’apaisait beaucoup...

    En une fraction de secondes, elle se mit à penser à tous les scénarios possibles tout en essayant d’en retirer le positif.

    S’il n’était pas atteint, tant mieux, ils pourraient continuer leur petite vie tranquille.

    S’il l’était bel et bien, elle s’imaginait qu’un traitement révolutionnaire permettrait de le soigner voire de le guérir et qu’il pourrait là aussi, vivre le plus longtemps possible.

    Pas une seule fois elle ne s’imagina un scénario catastrophe où elle perdait Köylen prématurément parce que c’était pour elle totalement inconcevable, contre-nature, illogique, voire même un gros bug dans la matrice...