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Kristina arriva comme convenu une heure plus tard à la nouvelle résidence familiale. Elle était assez contente d’être là car son père et sa belle-mère l’avaient beaucoup manquée, mine de rien.
Quand son père lui ouvrit la porte, il la prit dans ses bras et ne la lâcha pas pendant un long moment, heureux comme tout d’enfin voir sa fille aînée adorée.
- Tu m’as tellement manqué, ma chérie ! Ne me refais plus jamais ça ! J’ai besoin de te voir souvent ! La sermonna-t-il une fois l’étreinte terminée.
- Promis, papa. Je suis désolée de ne pas avoir été très présente... Ça ne se reproduira plus !
- J’espère bien, parce qu’il était souvent triste en pensant à toi. Intervint Mila en les rejoignant.
Kristina vint l’enlacer également en guise de salutation.
- Désolée encore une fois, oh la la... Commença-t-elle à « gentiment » s’agacer.
Ils rentrèrent finalement dans la maison et après lui avoir fait faire le tour du mobilier, lui laissèrent choisir sa chambre.
Elle partagea ensuite un très bon repas avec ses parents où elle les mit à jour sur sa vie et ses projets professionnels.
Elle était bien contente d’être la première arrivée car elle pouvait enfin avoir toute l’attention de son père. Elle savait que ce ne serait plus le cas une fois que Maya et Sebastian seraient là demain, alors elle profitait de lui à fond.
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♬ One Desire - Rio ♬
Un peu plus tard, en début de soirée.
Pendant que Mila était parti faire des courses de dernières minutes pour la semaine, Kristina se détendait en se balladant sur Pinterest tout en écoutant l’une de ses ballades préférées de Gen X dans le salon.
Elle n’avait pas regardé l’émission sur laquelle ils étaient passé parce qu’elle n’avait pas envie d’entendre parler de leur collaboration avec Calypso. Cependant, elle écoutait leur nouvel album non-stop depuis sa sortie et elle était tout simplement conquise par leur travail !
De plus, elle ne pouvait s’empêcher d’écouter deux titres en particulier : Blind and Frozen, leur nouveau single, et Seasons... tout simplement parce qu’elle se reconnaissait tout à fait dans les paroles. Il semblait lui faire passer un message et c’est ce qui la confortait dans sa certitude qu’il serait avec elle dans quelques heures.
La jeune femme vit son père arriver avec un tout petit album photo qu’il posa sur ses cuisses avant de s’assoir à ses côtés sans dire un mot. Kristina le regarda l’air perplexe avant d’ouvrir l’album.
Cliquez sur les images pour les voir dans leur taille originelle !
Là, elle y vit son père avec vingt ans de moins, accompagnée d’une jolie fille blonde. Ils souriaient et semblaient passer un bon moment. Elle comprit alors de qui il s’agissait... leur ressemblance étant sans appel.
- Maman...
- Eh oui... Je suis prêt à répondre à toutes tes questions, ma puce. Lui dit-il ensuite.
- Tout ce que je sais c’est qu’elle s’appelait Christina avec un C et un H... alors pourquoi pas commencer par me raconter comment vous vous êtes rencontrés ?
- On s’est connu au lycée, on était dans les mêmes classes. On était pote au début et au fur et à mesure ça a évolué... Rien de bien romanesque, franchement. Commença-t-il par lui dévoiler.
- Tu l’aimais ?
- Oui, c’était mon premier amour... Mais on a eu du mal à faire accepter notre relation à ses parents. À son père particulièrement. Il n’aimait pas les irlandais... Enfin tout ce qui n’était pas « cent pour cent américain » comme il le disait. En gros, il voulait qu’elle ne fréquente que ce qu’on appelle des W.A.S.P. Des blancs, anglo-saxons et protestants.
- Mais c’est tout ce que tu es, non ? Lui demanda alors sa fille.
- Non, mes parents étaient athées... même s’ils ont été élevés dans la religion catholique quand ils étaient enfants en Irlande. Ils ne m’ont donc pas élevé dans la religion, ce dont je leur suis très reconnaissant. On vivait dans un quartier chaud du Queens et on ne roulait pas sur l’or non plus contrairement à ta mère qui était issue d’une famille très aisée... Du coup au début on se voyait en cachette et arrivé en terminale elle est tombée enceinte par accident. Là on n’a pas trop eu le choix de tout dévoiler... Donc quand nos parents se sont rencontrés, ça a été une longue discussion avec pas mal de cris et de mots durs. Mais on voulait te garder depuis le début et tes grands-parents maternels étaient anti-avortement de toute façon... Du coup ils n’ont pas eu d’autre choix que d’accepter notre relation en fin de compte.
- Ils sont encore en vie ?
- Non, ils sont morts quand tu étais encore bébé. L’informa-t-il. - Bon, après tu connais malheureusement la suite... Elle a fait une hémorragie et n’a pas survécu à l’accouchement.
- Parle-moi un peu d’elle... Quel était son caractère ? Quelles étaient ses passions etc...
- Elle avait un caractère assez trempé comme le tien... Elle était très jalouse et possessive, aussi... Ce qui pouvait être agaçant par moments. Elle avait aussi une passion pour les insectes, les araignées en particulier... J’ai jamais vraiment compris d’où ça venait, mais bon...
Kristina fit les gros yeux en entendant ça avant de pouffer de rire. Son père l’imita.
- Pourquoi avoir déménagé à Cuba en particulier ? Tu aurais pu retourner en République d’Irlande.
- J’y ai pensé, figure-toi ! Mais j’ai toujours été attiré par Cuba depuis les cours d’histoire au collège et au lycée ! J’ai toujours été assez inspiré par les révolutionnaires Cubains et à l’époque je haïssais mon pays de naissance et leur impérialisme à la con. J’étais un espèce de rebelle sans cause à cette époque... Avec ta mère on projetait d’aller visiter ce pays après la fin du Lycée. N’étant plus là, j’ai pensé qu’y aller avec une partie d’elle serait comme lui rendre hommage... Donc six mois après ta naissance et avec la complicité de papi et mamie, je suis parti.
- Mes grands-parents maternels ne s’y sont pas opposés ?! Lui demanda alors Kristina.
- Pour te dire la vérité, depuis la mort de ta mère, ils ont tout fait pour te retirer à moi. La seule solution que j’avais c’était de partir alors c’est ce que j’ai fait avant qu’ils ne fassent appel à la justice. Connaissant les relations entre Cuba et les Etats-Unis à l’époque**, je savais qu’ils n’auraient aucun pouvoir sur nous. Lui apprit alors Brian.
- Heu... Tu m’as kidnappé en gros ?! S’exclama sa fille, ses yeux ronds comme des billes.
- Mais qu’est-ce que tu racontes, toi... ? Rétorqua son père, hilare. - T’es ma fille, je pouvais t’emmener ou bon me semblait. Puis il était injuste que ces gens réclament ta garde sous prétexte que j’étais un gamin de 19 ans « sans le sous » comme ils le disaient si bien. Depuis que j’ai su que j’allais être père j’ai pris toutes mes dispositions pour t’accueillir ! J’avais déjà des économies grâce aux divers petits boulots que je faisais quand j’étais lycéen et après le Lycée, j’ai travaillé non-stop comme barman dans un Pub irlandais ! Je me faisais beaucoup d’argent à cette époque ! Je n’allais sûrement pas laisser ces gens ignobles et racistes me prendre mon enfant... C’était hors de question !
Kristina sourit affectueusement à son père. Elle avait bel et bien fait fausse route pendant toutes ces années... En écoutant son récit, elle ne pouvait à présent plus nier que son père l’aimait inconditionnellement et pour le coup, elle se sentait assez coupable d’avoir douté de lui ainsi.
- Merci de m’avoir parlé papa...
- De rien, ma chérie.
- J’ai une autre question.
- Je t’écoute.
- Tu aimes Mila plus que tu n’aimais ma mère ?
Brian mit quelques secondes avant de répondre à cette question. Il ne voulait pas froisser sa fille ainée en lui répondant mais il se devait d’être honnête avec elle.
- Oui, Kris... Christina était mon premier amour mais Mila est l’amour de ma vie.
- Est-ce que tu t’imaginais rencontrer quelqu’un d’autre après maman ?
- Quand ta mère est morte, j’étais brisé et pour être honnête, rencontrer quelqu’un d’autre était le cadet de mes soucis... et puis Mila est arrivé. Répondit franchement Brian. - Ça n’a pas été un coup de foudre, hein. Je n’ai jamais eu de coup de foudre... C’était ma meilleure amie et de fil en aiguille je l’ai regardé autrement... Comme avec ta mère en fait.
- Donc parfois de belles histoires d’amour peuvent mettre du temps à évoluer ?
- Bien sûr. Chaque relation est unique... Fit remarquer son père avant de la scruter. - T’es en train de faire un parallèle avec ton histoire avec Köylen ou quoi ?
Kristina sursauta quand elle entendit la question de son père, ne s’attendant pas à ce qu’il fasse le lien aussi rapidement. Cette dernière avait peu parlé de sa relation avec le chanteur mais il savait l’essentiel...
Elle décida alors, pour la première fois depuis longtemps, de se confier à lui en lui racontant ses problèmes de couple avec le finlandais.
Brian écouta attentivement sa fille, content de partager ce moment avec elle. Il ne pouvait s’empêcher de s’identifier avec le jeune homme en question... la seule différence ici étant qu’il n’était clairement pas amoureux de ses deux filles mais bien de sa benjamine.
Cela le rendit triste parce qu’il voulait qu’à l’issue de cette semaine, toutes ses filles s’entendent bien. Il savait déjà que Kristina aurait du mal à accepter son lien de parenté avec Calypso bien avant cette histoire de cœur... alors là ce serait encore plus compliqué.
Il essaya alors de tempérer les choses comme il le put.
- Je ne pense pas qu’haïr Calypso soit la solution et tu ne peux pas contrôler les sentiments de Köylen. Il m’a l’air assez perdu de ce que j’ai compris... Si ça ne marche pas avec lui ce n’est pas grave, ma chérie. C’est la preuve que quelqu’un de mieux t’attend quelque part...
- Mais je le veux, papa ! Je l’aime !
- Quand on aime vraiment quelqu’un, il faut parfois accepter de le laisser partir si on constate qu’il sera plus heureux ailleurs. Lui dit alors son père avec bienveillance. - De la même façon que tu ne peux pas vouloir quelqu’un, il n’est pas un objet mais une personne. Je sais que c’est douloureux à entendre mais s’il décide de retourner avec son ex, il ne faudra pas le prendre personnellement, ma puce. Tu es jolie, talentueuse et quelqu’un de bien, tu finiras par trouver chaussure à ton pied. Ne te mets juste pas d’œillères ou de barrières inutiles.
Kristina ne répondit pas immédiatement car elle était en train digérer les dires de son père. Elle savait au fond qu’il avait totalement raison... mais elle n’arrivait toujours pas à se faire une raison. Tant qu’il y aurait un espoir avec Köylen, elle ne le lâcherait pas.
- Merci pour tes conseils, papa... Dit-elle tout de même. - Ça m’avait manqué de parler avec toi.
- Moi aussi, ma petite puce...
** Dans cette histoire et plus particulièrement au moment de cette scène, l'embargo et les tensions entre Cuba et les Etats-Unis sont terminés. Les ressortissants américains peuvent par exemple voyager / s'établir sans contraintes dans le pays et internet est accessible dans les foyers etc. Ce qui n'est malheureusement pas le cas en réalité ! :/